Dans nos derniers articles, Vivre la Restauration vous proposait une série d’entretiens avec Régis Marcon, et les premiers éléments du bilan de l’expérience qu’il a acquise ces dernières années dans le cadre du Comité France Formation et de la Mission Marcon menée depuis 2009.
Aujourd’hui, Régis Marcon revient sur la question de la labellisation des entreprises et les problématiques du « fait maison » au restaurant.
“Il est évident que la restauration « moyenne gamme » en France a perdu de son identité. Les médias ont beaucoup parlé de ce sujet, dans des reportages qui ont fait sensation, opposant la cuisine « faite maison » à celle réalisée à partir de produits préparés. C’est un constat effarant dans un pays dont le repas a été inscrit au patrimoine mondial de l’humanité.
Mais il faut d’abord se poser la question suivante : pourquoi en sommes-nous arrivés là ?
1) Beaucoup d’entreprises indépendantes sont à la recherche de collaborateurs. Faute de personnel, certains professionnels se tournent vers des produits préparés selon un pourcentage plus ou moins important, selon les cas.
Globalement, le coût de fabrication en cuisine n’a cessé d’augmenter, avec des taxes et des charges sociales qui pèsent de plus en plus sur les entreprises.
2) Au même moment, l’industrie alimentaire a fait de grands progrès et développé des gammes de produits de qualité, faciles à utiliser, avec une bonne commercialisation (il n’y a qu’à voir les catalogues luxueux des marques qui proposent ces produits).
3) Nous sommes dans un secteur où n’importe qui peut s’installer, sans diplôme ni expérience : 67% des restaurants en 2012 ont été repris ou ouverts par des non professionnels (chiffres de la Chambre de Commerce)
4) Il est urgent d’aider un peu plus les jeunes professionnels à s’installer, surtout en milieu rural. L’hôtellerie bénéficie d’aides, mais pas la restauration ; c’est illogique quand on sait qu’un restaurant est souvent moins rentable qu’un hôtel.
Faut-il pointer du doigt ces entreprises qui ne cuisinent pas sur place ?
Certainement pas. Ce n’est pas parce qu’on ne cuisine pas sur place que ce n’est pas bon.
De même, des restaurants, des groupes, ont choisi de mettre en place des cuisines centrales pour optimiser leur travail et leurs coûts en termes de charges sociales ; et ils le font bien.
Par contre, le client est en droit de savoir si la cuisine est faite ou non sur place. Il était donc important de labelliser les restaurants.
Le titre de Maître Restaurateur, idée du ministre Dutreil, reprise par le ministre Novelli en 2009 au moment du contrat d’avenir, était une bonne initiative. Mais le nombre a de la peine à augmenter, malgré les efforts de ses responsables, et surtout ce titre excluait des restaurants qui réalisaient un seul menu du marché, ce qui est vraiment regrettable. Toutefois, je crois que le cahier des charges est à même d’évoluer.
D’autres labels ont depuis vu le jour. Or, je pense que la multiplication des labels entrainera une incompréhension des clients. Au même moment, le ministère du Tourisme s’est penché sur cette problématique en organisant plusieurs rencontres de travail. Malheureusement, les syndicats n’ont pas réussi à s’entendre entre eux, le ministère a fini trancher et a opté pour le « fait maison » ; je ne suis pas sûr que cette mesure soit la plus efficace, beaucoup de parlementaires se posent la question.
Votre mission a été initiée par la profession et par l’ancien gouvernement en 2009. Comment a été perçu votre travail par le gouvernement actuel ?
Plutôt bien.
Forcément, il m’a fallu rencontrer d’autres interlocuteurs. Du coup, on ne gagne pas du temps, mais mon travail sur le livre blanc a été bien perçu, et la mise en place du permis de former est un engagement fort de la profession qui montre que l’on a envie d’avancer.
Le Président de la République y a été très sensible en nous recevant à l’Elysée. Suite à ces discussions, nous avons pu avancer sur différents points. Nous sommes notamment tombés d’accord sur le fait que la problématique de l’emploi formation devait être traitée en interministériel (Ministère du Commerce, Artisanat, Tourisme / Ministère Emploi, Formation et Education Nationale) et non avec chaque ministère séparément. »
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A suivre :
« Une stratégie globale pour booster le secteur » le bilan de Régis Marcon, fondateur du Comité France Formation (6).
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