« Nous encadrons une formation par an intitulée « Créer sa carte de restaurant», Jean-Michel Robbier, Professeur de salle, Ferrandi, Paris (3/3)

Professeur de salle à l’école Ferrandi, Jean-Michel Robbier a également participé à la mise en place d’une formation complémentaire « Créer sa carte de restaurant ». Diplômante, cette formation pour adultes, s’adresse à des personnes en reconversion professionnelle, comme à des entreprises, dans le cadre de la formation continue. Après nous avoir parlé de son parcours, et de sa vision de l’enseignement des métiers du service, Jean-Michel Robbier nous présente cette nouvelle formation.30

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« C’est suite à la demande d’une entreprise spécialisée dans la mise en page des cartes et menus que nous avons eu l’idée de proposer cette formation. L’entreprise souhaitait former ses employés à la conception des cartes et menus de leurs clients. Je me suis rendu compte que ce sujet était riche, qu’il était même indispensable au bon développement d’une entreprise.

Un établissement qui prend la peine de mettre en place, de changer et de transformer régulièrement sa carte et ses menus peut augmenter son chiffre d’affaire de près de 20% ! Il s’agit véritablement d’un levier de communication décisif pour une entreprise de restauration, permettant à la clientèle de découvrir et choisir facilement parmi ses propositions.

Pendant deux ans, nous avons donc travaillé sur la création et le contenu pédagogique de cette nouvelle formation, intitulée « Créer sa carte de restaurant ». Elle s’articule autour de l’élaboration des cartes et menus comme outils commerciaux, mais aussi comme outils de gestion pour l’entreprise (voir ci-joint la présentation détaillée du programme).

Nous encadrons aujourd’hui une formation par an, qui s’adresse à des promotions de 12 à 20 élèves. Nous sommes encore au début du processus, mais je suis persuadé que c’est un programme appelé à se développer, car il intéresse directement les personnes en formation pour la gestion et l’ouverture de restaurant. C’est une formation d’avenir.»

A lire en complémentPrésentation programme carte et menus [PDF]

«Travailler en entreprise et être formateur, ce ne sont pas les mêmes métiers», Jean-Michel Robbier, Professeur de salle, Ferrandi, Paris (1/3)

Professeur de salle à l’école Ferrandi, Jean-Michel Robbier est titulaire d’un Brevet de Technicien Hôtelier, obtenu en 3 ans à Thonon-les-Bains, et d’un BTS cuisine et salle option B, réalisé en 2 ans au lycée des métiers de l’hôtellerie Jean Drouant à Paris. Lors de notre rencontre, nous lui avons demandé comment il était venu à la formation.

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«J’ai travaillé 20 ans en entreprise, dont une année en Angleterre pour apprendre l’anglais, en occupant tous les postes en cuisine et en salle, du commis au chef de rang. La première partie de ma carrière, je l’ai faite dans le groupe Accor, pour les hôtels Mercure, Novotel et Pullman. J’ai ensuite rejoint le groupe Concorde et travaillé à l’hôtel du Louvre. Durant tout mon parcours en entreprise, je suis resté en contact avec la formation en recevant des jeunes en alternance. J’ai aussi eu l’occasion de faire des vacations à l’école Ferrandi et à l’ICOGES, une école privée qui ne prépare que des BTS. Comme beaucoup de professionnels, je me posais des questions sur ma carrière et la suite qui je pouvais lui donner. Et puis, grâce à des rencontres, j’ai franchi le pas pour ne faire que de la formation à Ferrandi.

Travailler en entreprise et être formateur, ce ne sont pas les mêmes métiers, même s’ils portent sur le même sujet. Par contre, je reste persuadé que le travail en entreprise et l’expérience reste indispensables pour être formateur. Quand nous parlons à un apprenti, il nous faut être capable de comprendre le système permettant de passer de la formation théorique à l’école à la pratique acquise en entreprise.»

A suivre :
– «En salle, tout doit être simple et facile», Jean-Michel Robbier revient sur les difficultés de l’enseignement des métiers de la salle (2/3)
– « Nous encadrons une formation par an intitulée « Créer sa carte de restaurant», Jean-Michel Robbier nous présente le programme original qu’il a développé à Ferrandi. (3/3)

« L’apprenti n’est pas là pour boucher les trous », Nicolas Magie, chef de cuisine, hôtel Saint-James, Bouliac (3/3).

Depuis deux ans, Nicolas Magie est chef des cuisines de l’hôtel Saint-James, à Bouliac en Gironde. Lors de nos précédents entretiens, nous l’avons interrogé sur les rencontres marquantes de son parcours, et sur sa vision de la formation actuelle.

Pour cette dernière rencontre, Nicolas Magie nous précise comment il conçoit l’apprentissage, et pourquoi il a décidé de n’accueillir que des stagiaires au Saint-James.

 Hotel STJ Portrait NM 5 -DroitsHervé Lefébvre

« J’ai eu la chance de travailler dans de petites maisons, où nous étions entre trois et cinq en cuisine, avec un chef-patron omniprésent. Ces brigades de petite taille nous permettaient de toucher à tous les postes, toutes les spécialités du travail de cuisinier. Pour moi, ça, c’est une réelle chance.

Depuis deux ans que je suis au Saint James, je me rends compte que les jeunes sont hyper spécialisés : parfois, en 10 ans de métier, ils peuvent n’avoir travaillé qu’à un seul poste – et par conséquent ne connaître que le travail lié à celui-ci. J’ai rencontré des jeunes qui avait fait 10 ans de garde-manger et qui ne connaissait que ça.

L’une des grandes difficultés de l’enseignement en alternance, c’est de permettre aux jeunes en formation d’aborder et de toucher à tous les postes. Et ceci, afin qu’ils ne soient pas seulement des exécutants, mais bien des cuisiniers.

Au Saint James, tout au long de l’année, nous avons 4 stagiaires, en général en 2ème année de Bac. Si, à la Cape, mon ancien restaurant près de Bordeaux, je prenais des apprentis, c’est parce que j’estimais que j’avais le temps de les former et de m’occuper d’eux pour les guider. Ce n’est plus le cas dans mon nouveau poste.

Recevoir dans son entreprise un stagiaire ou un apprenti implique deux types d’accueils totalement différents.

Pour un apprentissage, le formateur est vraiment là pour guider l’apprenti et pour lui faire répéter ses gammes : écailler et lever les poissons, faire les pâtes en pâtisserie, etc. J’estime que c’est la mission de l’alternance en entreprise. Car dans un restaurant, c’est aussi l’habitude et la constance de la réalisation qui forme. A l’école, ils apprennent à faire la pâte feuilletée. En entreprise, ils vont la faire de nombreuses fois pour pouvoir la maîtriser parfaitement.

Il est indispensable que tous les restaurateurs, chefs, hôteliers, comprennent bien qu’un apprenti n’est pas là pour remplacer un employé mais qu’il est là pour apprendre. Le chef est son formateur et doit être disponible ; l’apprenti n’est pas là pour boucher les trous, mais polir et réaliser ce qu’il a appris théoriquement à l’école. C’est pour moi la définition même de l’alternance.»

«Il faut aimer le métier, et aimer son métier c’est déjà le transmettre», Olivier Bellin, Auberge des Glazicks, Plomodiern (3/4).

Lors de nos précédents entretiens, Olivier Bellin nous racontait son parcours : d’un côté, en évoquant les restaurants où il a pu affiner sa pratique de la cuisine, de l’autre en rendant hommage à son professeur de cuisine au lycée, Monsieur Guillaume.

Aujourd’hui à la tête de l’Auberge des Glasicks dans le Finistère, Olivier Bellin nous explique à présent ce qui est pour lui indispensable à enseigner aux jeunes qui veulent devenir cuisinier.

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« Je pense qu’il y ait deux choses importantes à enseigner, que ce soit avec les professeurs à l’école, ou en entreprise avec les maîtres d’apprentissage :

– D’abord, il faut aimer le métier, et aimer son métier c’est déjà le transmettre. A un peu plus de 40 ans, je suis peut-être aujourd’hui à la jonction entre nouvelle et ancienne cuisine. S’il faut être moderne, cela ne doit pas nous empêcher d’être nourris du passé. C’est ce qui fait mon plaisir à cuisiner – et ça, je peux le donner aux jeunes qui viennent dans mon restaurant.

– Ensuite, pour se former, je crois qu’un jeune en entreprise doit toucher énormément de produits et de matières. Il est là pour apprendre et apprendre, c’est tester. Il n’ y a que la pratique qui peut donner cela. Je crois à la formation parce qu’il y a des jeunes qui ont envie.

Il ne faut pas forcément se fier à ce que l’on voit quand on rencontre un jeune, chevelu, ébouriffé, un peu surfeur. Il peut très bien vous montrer une véritable passion pour travailler et apprendre à cuisiner. Je viens d’en rencontrer un comme ça. Je lui ai demandé de se couper les cheveux, parce qu’effectivement, moi même, j’ai appris à être bien rasé, à avoir les cheveux impeccables, les mains propres et à être bien habillé pour travailler. Eh bien, ce jeune s’est coupé les cheveux. Par ce geste, il m’a tout simplement montré qu’il avait une vraie envie, et qu’il était prêt à changer pour apprendre.

De mon côté, en retour, je dois faire attention à lui. Je dois tout faire pour lui montrer que j’aime mon métier avec passion, et lui donner la chance de voir, de toucher et de préparer les plus beaux produits, pour qu’il mémorise leurs parfums et leurs goûts.»

 

A suivre :

– « Une chose est déterminante dans la formation, c’est goûter », Olivier Bellin revient sur un point essentiel dans la formation des futurs cuisiniers (4/4).

«Peu de gens se rendent compte que la cuisine, c’est avant tout chronophage», Alexandre Gauthier, La Grenouillère, La Madeleine-sous-Montreuil (2/3)

Dans notre dernier article, nous donnions la parole à Alexandre Gautier pour qu’il revienne sur les personnalités qui ont marqué sa formation. C’est en 2003 qu’Alexandre Gauthier reprend les cuisines de La Grenouillère, prenant la suite de son père. A 35 ans, il est déjà récompensé par 2 étoiles au guide Michelin et 4 toques au guide Gault & Millau. Nous lui avons demandé ce qui était le plus difficile à apprendre pour un jeune cuisinier.

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« La première des qualités pour un jeune cuisinier, c’est d’être courageux. Il ne doit rien lâcher. Il faut faire vivre des choses aux jeunes et leur faire comprendre que le métier de cuisinier, c’est prendre du plaisir en donnant du plaisir. Et cela autant que faire se peut dans tous les styles de restauration. Mais c’est une chose compliquée à apprendre car avant le plaisir au travail, les jeunes viennent surtout apprendre un métier pour gagner leur croûte. Ne jamais oublier cela, dans la majorité des cas, les gars ou les filles sont là pour avoir un métier, pas pour le fun ou le plaisir.

Je pense que le plus difficile à enseigner, c’est le rythme. Au boulot tôt le matin et tard le soir, c’est dur physiquement. Peu de gens se rendent compte que la cuisine, c’est avant tout chronophage. Si tu veux vraiment vivre la cuisine, tu es très vite pris tout le temps par ton métier. Chaque jour d’ouverture, nous avons deux ‘dead-line’ : le service du midi et le service du soir. C’est très compliqué de passer de la vie à la maison, tranquille, à la vie de cuisinier, où la tension est permanente ; il faut arriver à accepter que la vie change autant. Le plus dur en cuisine, ce n‘est de faire cuire un homard, ça c’est de la technique, le plus dur c’est de le faire tous les jours, au rythme du restaurant et des services.»

A suivre : « Je ne suis ni son père, ni son professeur, juste un maître de stage », Alexandre Gautier nous explique pourquoi il ne veut ne plus accueillir d’apprenti.